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L'En Dehors


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Individualisme anarchiste et féminisme à la « Belle Epoque »

Les liens entre le mouvement anarchiste et le mouvement féministe sont loin d’avoir été toujours très clairs. Tout commence, mal, avec Proudhon et son fameux « ménagère ou courtisane ». Puis, avant la Première Guerre, alors que le mouvement féministe prend de l’ampleur, les anarchistes critiquent et rejettent les revendications concernant le droit de vote ou l’accès à des professions libérales pour les femmes. La liberté n’est pas quelque chose que l’on doit recevoir, il s’agit de la prendre.C’est donc des démarches nettement plus pratiques que les anarchistes vont privilégier, comme le montre leur engagement dans la propagande néo-malthusienne. Défiant l’héritage même de Malthus qui se transforme en « encouragement au pêché et à l’agitation sociale »1, ces derniers diffusent idées sur la réduction des naissances – facteur d’émancipation individuelle – et moyens pratiques de contraception ou pour avorter, corollaires indispensables à la libération sexuelle. C’est ainsi que se forment des ponts entre le mouvement anarchiste et des féministes comme Madeleine Pelletier ou Nelly Roussel2. Mais c’est également par ce biais que s’accentue la division avec le mouvement féministe dans son ensemble. En effet, la majeure partie des féministes tombe d’accord sur le contrôle des naissances, mais s’oppose à l’avortement et même à la contraception. Ces pratiques rendent les femmes impures et trop semblables aux prostituées. Elles préfèrent célébrer la maternité que le libre épanouissement sexuel.

Au contraire, du côté des anarchistes, la question sexuelle est tout à fait centrale et c’est souvent par elle que se pose la question de l’émancipation de la femme: la femme ne pourra donner libre cours à ses désirs que si elle n’est plus à la merci de son mari, compagnon ou amant. Les compagnons prônent l’amour libre, pratiquent plus généralement l’union libre. Les compagnes sont loin d’être toutes acquises à ces idées. Il faut bien reconnaître que la plupart des couples sont « demi-anarchistes ». Certains s’en contentent, comme le souligne Sophia Zaïkovska, une anarchiste individualiste et féministe : « L’émancipation de la femme est, selon moi, très mal posée chez les anarchistes. La femme n’est guère envisagée que comme épouse ou amante, que comme complément de l’homme et incapable de vivre sa vie pour et par elle-même. »3 D’autres reconnaissent alors la nécessité de l’émancipation de la femme. Aux anarchistes se pose le même problème qu’aux républicains quelques années auparavant : Jules Ferry voulait donner des compagnes républicaines aux hommes républicains, seul moyen d’éviter le divorce entre la femme croyante et le mari libre penseur (Les filles auront alors accès à un enseignement secondaire mais qui n’a ni la durée, ni l’ampleur des vues de son équivalent masculin). Il est clair que les femmes sont également des compagnes (possibles obstacles à la lutte ou dangers de démobilisation), des mères (les appels antimilitaristes faisant appel au sentiment des mères sont nombreux dans les écrits anarchistes) et des éducatrices.

Les quelques femmes anarchistes ne s’arrêtent cependant pas à ces considérations virocentriques, basées sur le « manque de femmes » dans les milieux anarchistes. Des discussions émergent au sein des journaux sur le partage de la responsabilité vis-à-vis de l’enfant ou des tâches ménagères. On recherche la co-éducation (la mixité) pour les enfants dès leur plus jeune âge, ce qui doit permettre une meilleure entente hommes-femmes, en partie au niveau sexuel.

Et s’il est rarement possible d’identifier les femmes autrement que par leur compagnon, quelques unes sortent de l’anonymat par leurs écrits, leur participation à des conférences, ou leur habitudes de vie. Quelques oubliées (notamment par le Dictionnaire Biographique du Mouvement Ouvrier) et qui sont pourtant, encore aujourd’hui, plutôt étonnantes…

Il apparaît que la presse représentant la tendance individualiste, L’Ere nouvelle, l’anarchie ou La Vie anarchiste, a été créée puis gérée par des couples plus que par un homme : au côté d’Emile Armand, on trouve Marie Kügel4, au côté de Libertad, Anna Mahé (et quelques années plus tard Rirette Maitrejean avec Victor Serge) et au côté de Georges Butaud, Sophia Zaïkovska. Il n’est qu’à remarquer l’irritation qui perce dans certains rapports de police face à la prise en main de l’anarchie par Anna Mahé pendant le séjour en prison de Libertad. De plus de nombreuses femmes écrivent des articles dans ces périodiques, ou du moins sont incitées à le faire. Et les réflexions se développent quant aux moyens de favoriser l’émancipation économique de la femme. Quant à l’émancipation sexuelle, on apprend que Sophia Zaïkovska vécut un « amour plural » tout à fait heureux, ou simplement que les anarchistes, après mariage, avaient souvent plusieurs compagnons dans leur vie, et ce contrairement aux normes sociales en vigueur. Ainsi, Emilie Lamotte, institutrice, artiste peintre, écrivant pour Le Libertaire ou l’anarchie eût au moins trois compagnons dans sa vie (elle pensait que la « constance » n’était pas une chose naturelle) ; Rirette Maitrejean qui après s’être mariée avec un illégaliste, fréquenta Mauricius, un individualiste, puis Kibaltchiche (plus connu par la suite sous le nom de Victor Serge). Ces femmes ont généralement dépassé les difficultés autour de l’entente sexuelle pour pouvoir se consacrer de manière plus intense à leur idéal anarchiste. Où l’on voit que l’idéal anarchiste engageait à une réflexion sur le mode de vie quotidien, à une pratique de la liberté plutôt que l’attente de sa reconnaissance sociale.

Il semble finalement, lorsqu’on observe les milieux individualistes que les femmes, aussi peu nombreuses soient-elles, vivaient alors une situation économique, morale ou sexuelle relativement égalitaire avec leurs compagnons. « Vivre en anarchiste », tel que le préconisait les individualistes ne pouvait se comprendre que comme émancipation de l’individu, sans distinction de sexe, même si l’on reconnaissait que la femme avait un plus long chemin à parcourir pour y parvenir.

On est alors enclin à penser plutôt à un décalage entre anarchisme et féminisme qu’à une insuffisance de l’un par rapport à l’autre ; le féminisme se concentrant sur les droits des femmes (ce qui en est la définition stricte), l’anarchisme sur une mise en pratique au quotidien. Pour finir, il est une chose qui surprend dans les textes de l’époque, dans la manière même dont les femmes s’adressent aux femmes et qui serait (est) fort mal vue aujourd’hui : ces femmes savent parfaitement que si elles ne se prennent pas en main, personne ne le fera pour elle et qu’elles ne réaliseront pas leur émancipation en se posant constamment en victimes, en faisant appel à un ordre moral ou à la pitié.

 Shalazz

1 Ronsin, Francis, La grève des ventres. Propagande néo-malthusienne et baisse de la natalité en France. 19e-20e siècles, Aubier, 1980, p. 31

2 Elle fut l’une des personnalités les plus en vue du féminisme radical et une oratrice active pour la propagande néo-malthusienne.

3 S.Zaïkovska, « Le féminisme », La Vie anarchiste, 1er mai 1913, n°12, reproduit dans « Communautés, naturiens, végétariens, végétaliens, crudivégétariens dans le mouvement anarchiste français », supplément à Invariance, Nexon, n°9, 1994, p. 157

4 (1872 ?-1906) Compagne d’Emile Armand avec qui elle fonda L’Ere nouvelle en 1901 et vécut sans doute de 1902 à 1906 « en-dehors de la morale ». Elle participa activement à la rédaction du journal auquel elle enjoignit les femmes de participer dès son premier article. Elle fit partie des 250 premiers sociétaires pour la constitution du milieu libre de Vaux et la partie de la circulaire concernant le statut des femmes avait été rédigée par ses soins. Il semble qu’elle se préoccupa principalement de l’émancipation féminine, comme des réalisations pratiques de la « Cité future » (préoccupation essentielle du journal).

Ecrit par , à 23:29 dans la rubrique "Le privé est politique".

Commentaires :

  libertad
23-05-03
à 11:32

Voila une idée tout à fait intéressante et un partage qui mériterait sans doute d'être réactualisé aujourd'hui entre féminisme et anarchisme : défense des droits pour le féminisme et mise en pratique au quotidien par les femmes anarchistes refusant toute pitié et vivant leur liberté. L'amour libre et la libre sexualité redeviendraient ainsi un enjeu de débat et de mise en pratique dans notre millieu, loin de la pauvreté de nos analyses actuelles sur la vie quotidienne et la "vraie vie"
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  caserio
23-05-03
à 18:16

L'amour libre et le probleme des enfants

Je m'était interesse un moment à l'amour libre (sur ton site l'en dehors individualiste, rubrique amour libre) et je pense que c'est, en effet, quelque chose sur lequel le mouvement anar devrait à nouveau débattre.
Les idées de l'amour libre sont bonnes mais il y a le probleme des enfants: comment s'en occuper si le cxouple n'est pas stable? Je pense que pour répondre à cette question il faudrait s'interesser à l'abolition de l'enfance et ainsi imaginer (et pratiquer) une libération des jeunes où ceux-ci seraient plus responsable et indépendant de leurs parents(sauf, je pense, les enfantsen bas age).Pourquoi pas.
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  libertad
23-05-03
à 19:59

Re: L'amour libre et le probleme des enfants

Tu as raison de poser le problème des enfants et tu indiques je pense la bonne piste sur une autre façon de concevoir l'enfance ( dont les anars ne discutent plus non plus d'ailleurs ), j'avais trouvé excellent un vieux texte mis sur le site : Mes enfants me sont seulement prêtés ... car ils s'appartiennent mais la discussion n'a guère avancé en ce domaine depuis le début du siècle. Quant à l'amour libre je me demande s'il n'apporterait pas plutôt une stabilité pour les enfants si les adultes étaient capables de s'accorder la liberté réciproque plutôt que de se considérer comme le propriétaire du corps de l'autre. Le nombre de divorces et de séparations n'est pas un gage de la stabilité et de la responsabilité des adultes envers les enfants ( je ne parle même pas des cas où ils sont pris en otages ). Ne peut-on imaginer une liberté amoureuse, ayant comme pivot l'éducation commune des enfants ? Car sans parler de l'autonomie affective, l'autonomie financière des enfants est encore repoussée à l'heure actuelle.Sens des responsabilités envers de jeunes êtres qui s'appartiennent et n'appartiennent à aucun des parents individuellement, ni aux deux, pas d'enfants otages et liberté amoureuse, voila qui amènerait moins de gachis que le système actuel.
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  libertad
24-05-03
à 09:38

Amour libre

A propos de l'amour libre, je conseille la lecture de deux brochures éditées par la Question sociale : la n°7 et la n°11 : points de vue masculins et féminins.
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  Anonyme
24-05-03
à 17:06

Re: à quand un mouvement anti-agiste?

tJe suis tout à fait d'accord avec toi quand tu dis que "le nombre de divorces et de séparations n'est pas un gage de la stabilité et de la responsabilité des adultes envers les enfants", je n'avais pas vu les choses comme cela, c'est un argument tres interessant. Dans mon militantisme je me suis interesse à l'antiracisme, à l'antisexisme, à l'antispécisme et puis j'ai entendu parler d'un combat contre les discriminations entre les générations, cela m'a interesse mais je me suis tres vite aperçu qu'il n'y existait presque rien à ce sujet: ni revue, ni association,presque aucun livre... Et pourtant cet idée d'antiagisme existe depuis longtemps, les feministes de 70 en ont parlé, on en trouve quelque prémisses dans Libres enfants de Summerhill... Il faudrait qu'un jour un débat soit lancé (dans lequel on ferait le lien avec l'amour libre- du moins pour la question de la jeunesse car l'antiagisme veut liberer toutes les classes d'ages y compris les adultes) car je pense qu'il y a des choses tres interessante à en sortir. Je dis cela mais personnellement je n'ai pas, pour le moment, un avis tres devellope sur la question, et c'est justement cela qui est frustrant: ne pas savoir quoi penser, ne pas savoir comment etre avec les differentes classes d'age, et se dire que notre comportement est construit selon notre age (comme il est construit selon notre sexe)sans savoir quel serait notre comportement naturel si nous étions libere
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  libertad
24-05-03
à 20:22

Re: Re: à quand un mouvement anti-agiste?

Je pense que tu as raison et qu'une confrontation entre les perspectives ouvertes par l'amour libre, l'anti-agisme mais aussi peut-être le mouvement communautaire post68 dont le bilan n'a pas été tiré, serait riche pour élaborer de nouveaux modes de vie plus respectueux des individu(e)s alors que le système actuel est un beau gachis pour tout le monde : enfants, adultes et amour.

Concernant l'anti-agisme il y a quand même diffusion du thème et débat dans la mouvance vegan-non profit-squats au sens large, une page intéressante sur ce sujet : Domination agiste

Quant à l'amour libre c'est devenu un sujet tabou depuis qu'une partie du mouvement féministe a pris comme postulat que la "libération" sexuelle s'était faite au détriment des femmes ( l'amour libre ne se résume pas d'ailleurs à cela ). Nous sommes dans une période où il devient difficile de discuter du quotidien, brasser de grandes idées qui n'engageant à rien, oui cela on nous l'autorise. Comme tu le dis bien d'ailleurs, sur certains sujets on ne sait plus que penser !

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  loisnoir
15-08-05
à 07:22

Re: Re: Re: à quand un mouvement anti-agiste?

que vous avez toutes et tous raison ... mais ce qui nous manque, à nous, libertaires, et autres en-dehors, libres amoureuses/x, ce sont des lieux où l'on peut se rencontrer, sans tabou, sans barrières, dans le respect de chacunEs ... sont où ces lieux ? et, est-ce que les anars et les anares, ne sont pas, in finé, de fifreux/ses puribondEs ? à la r'dévoilure ! loisnoir
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  delphine314
26-03-07
à 21:39

Re:

""""Voila une idée tout à fait intéressante et un partage qui mériterait sans doute d'être réactualisé aujourd'hui entre féminisme et anarchisme : défense des droits pour le féminisme et mise en pratique au quotidien par les femmes anarchistes refusant toute pitié et vivant leur liberté""".

Après avoir parcouru les différentes formes de féminismes ' me sentant plutôt anarka-féministe personnellement tout en souhaitant profondemment réconcilier les féministes, afin qu'un même féminisme réunisse et corresponde à toutes les femmes, quels que soit leur propres vécus', j'en suis arrivée à cette même conclusion tout recemment. C'est  la  perspective d'un féminisme rassembleur et constructif tel qu'il aurait du appraître dans les années 80, quand le féminisme a commencé à s'autodétruire. Merci de l'avoir formulé libertad

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  delphine314
27-03-07
à 02:42

Re: Re:

Et puis il ne faut pas confondre égalité et galanterie, hein? L'égalité faut aller la chercher de force!
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  delphine314
27-03-07
à 16:43

Re:

Libertad

Mais est ce  que toutes les femmes anarchistes sont pour autant des anarka-féministes ou anarka-anti-sexistes...? j'espère que tu vois ce que je veux dire à travers les mots...

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  Anonyme
27-03-07
à 17:35

Re: Re:

Bon, je débarque sur un fil qui a démarré i y a longtemps et que je viens de parcourir rapidement. Deux questions.

• Intéressante l'expérience de Summerhill, mais à 50 000 Francs/an de frais de scolarité, à qui s'adresse l'émancipation ?

• Domination âgiste (sous titre du lien libération des enfants)... Le jeunisme n'est-il pas lui aussi un agisme ?

Signé : Front Populaire de Libération des Vieux
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